1997, Envoûtements II, musique de chambre, duo
Durée : 10′
Effectif : Flûte et marimba
Dédicataire : Jacques Ménétrey
Commanditaire : Ensemble Orchestral de Paris
Création : 20 mars 1997, Paris Opéra comique, Clara Novakova, Jean Geoffroy
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Notice de Envoûtements II
Deuxième volet du cycle des Envoûtements, Envoûtements II, conformément à son numéro d’ordre, est écrit pour un duo instrumental, qui associe flûte alto et marimba. Cette pièce achevée le 15 janvier 1997 et créée le 20 mars suivant à l’Opéra-Comique de Paris par Clara Novakova et Jean Geoffroy, solistes de l’Ensemble Orchestral de Paris, est dédiée au percussionniste suisse Jacques Ménétrey.
Suzanne Giraud a placé Envoûtements II sous le signe d’une couleur, le rouge sombre, celle des braises sous les marmites incandescentes des sorcières. La partition est gouvernée par l’autre sens de la traduction anglaise du terme « envoûtement », « spell », qui signifie aussi « épeler » et qui s’impose entre autres lorsque les sorcières invoquent les démons devant leurs chaudrons en marmonnant des mots incompréhensibles au commun des mortels. Ces formules incantatoires leur permettent de transformer la matière originelle. Ainsi flûte et marimba « entrent en ébullition » pour jouer comme une scène de sorcellerie. La structure de la pièce répond à la transformation d’une matière sonore par fusion, éclatement, diffraction comme si les deux instruments subissaient une mutation alchimique.
Cette histoire de sorcières instille à l’œuvre une sonorité ténébreuse, mordorée comme un épais liquide en ébullition, les formules magiques étant évoquées par les interprètes eux-mêmes qui jouent non seulement de leur instrument, mais aussi de leur voix. « Pour suggérer l’image de sorcellerie, confie le compositeur, il me fallait deux exécutants libres d’eux-mêmes, qui n’aient pas à changer d’instruments, ce qui aurait pu nuire à l’atmosphère. Cette pièce est constituée de quatre “cercles”, terme que l’on trouve dans l’Amour sorcier de Manuel de Falla. Le deuxième expose la tension la plus faible et use de divers modes de résonances, notamment une caisse claire placée sous le marimba dont elle fait grésiller le son. J’y ajoute la voix de l’instrumentiste, alors que je confie à la flûte des sons blancs auxquels j’associe un dosage progressif du souffle. Les premier, troisième et quatrième cercles qui l’encadrent forment contrastes avec lui, car ils sont plus directement liés au mouvement, voire à la projection, jusqu’à l’éclaboussure dans la conclusion ».
Dans le deuxième cercle d’Envoûtements II, Giraud a poussé plus avant les quatre cercles d’Envoûtements pour violon, bien que le marimba n’autorise pas le quart de ton. Il a donc fallu au compositeur fondre les tessitures des deux instruments, ce qui permet en outre de disposer d’une plus large étendue de notes. « En subdivisant l’œuvre conformément à la théorie des proportions, je suis tombée sur des rythmes complexes qui font qu’il y a un flux continu exposé dès le premier cercle qui reste liquide d’un bout à l’autre. Ainsi est-il quasi impossible de se caler sur des pulsations, des ancrages, le flux sonore continu liquéfiant, pour ainsi dire, l’écoute ».
L’envoûtement est donc total, constant.
Bruno Serrou
Envoûtements II, Henri Tournier
Rose de sang au feu brûlant et dur
La flûte sûre étend sa pure
Inflexion où brille un diamant
Dont tout l’éclat se brise au vent
Lugubre mur couleur lourde toujours
Souvent se soulève le jour
Et son cortège aberrant de folies
Rampant dans la ronde des nuits
Envoûtement tout vibre sourdement
Incantation hors du temps
L’horizon rouge étend son alchimie
À l’espace clos de l’ennui
Un soupir court venu du fond de l’âme
Coupe la douleur sourde et calme
Le silence se fait soudain plus pur
La nudité du mot plus dure
En apprendre davantage sur Henri Tournier, Universitaire, mélomane et organiste amateur